100Lux créations 2019 | Au-delà du geste

© Do Phan Hoi

Depuis maintenant sept ans, l’organisme à but non lucratif 100Lux cherche à innover dans la promotion et la création des danses urbaines. Promoteur de l’art de la rue, 100Lux dévoile les nombreux talents de cette communauté et propose une programmation annuelle aux multiples facettes.

Quelques mois avant son passage à Tangente, l’organisme a dévoilé hier soir trois nouvelles créations scéniques et une œuvre cinématographique. Retour sur des créations qui vont bien au-delà du geste.

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Gestes créateurs …

Un des premiers points à soulever est la variété chorégraphique présente. Ce n’est pas un style de danse urbaine qui est mis de l’avant, mais bien toute une culture.

Et cette culture, elle parle grâce au bounce et au rock des mouvements hip-hop comme dans la pièce « Karma » (Lakesshia Pierre-Colon), mais aussi à travers l’énergie contagieuse de la house ressentie dans la création « Mom’s spaghetti » (Dominique Sophie). On retrouve aussi les fondements mêmes de ce mouvement avec des références au cypher et au break dans le court-métrage « Crack The Cypher » (Tentacle Tribe) et on redécouvre le waacking autrement avec la pièce « Filigrane » (Forêt Noire).

Qu’ils fassent partie de la relève comme dans la pièce « Karma » ou qu’ils soient des danseurs professionnels établis, les artistes présents sur scène partagent tous cette culture et cherche à y introduire leur patte et leur spécificité chorégraphique.

La soirée s’enchaîne donc dans la multiplicité des mouvements et des rythmes, dans un esprit de partage, mais aussi dans une envie de dépasser le symbolisme de la danse.

… et évocateurs

Lors de cette soirée, on découvre ou redécouvre des talents et des maîtrises techniques remarquables, mais cette fois-ci, on va plus loin. Les quatre créations se rejoignent sur le besoin de parler à travers sa danse, sur l’envie de se dévoiler, plus fragile et plus sombre.

Dans « Karma », les gestes du quotidien plutôt nonchalants laissent place à l’affect. Le rejet et l’affrontement prennent le dessus et amènent de la puissance au groupe. Dans cette même idée, « Filigrane » dévoile des sentiments de colère et de lutte qui se mélangent à la délicatesse et à la sensualité des mouvements du buste et des bras, caractéristiques du waacking. Les tableaux s’enchaînent et cherchent à symboliser des états par une gestuelle, douce et forte à la fois. Une pièce qui puise dans l’essence du waacking et qui cherche à l’amener ailleurs et à en faire un support de toutes les sensibilités.

Dans une tout autre sensibilité, le film du duo Tentacle Tribe transpose les codes. Et si on sortait du cypher ? Et si la culture hip-hop allait plus loin que cet affrontement et ces battles qui cherchent finalement à trouver un « gagnant » ou un « plus fort que »? Ici, on décrypte le mouvement pour sa faculté à réunir, sa possibilité d’aller toujours plus loin, quelque soit l’espace. On prend les codes de la culture et on les amène ailleurs, dans un partage gestuel et sentimental.

Dans cette même idée de décloisonner, on retrouve la pièce originale et sensible de Dominique Sophie. En toute transparence et avec une bonne touche d’humour, la chorégraphe nous plonge dans un faux battle mais surtout au fond des pensées des danseurs.

À travers une théâtralité juste et des paroles engagées, l’artiste dévoile sa vulnérabilité, ses questionnements et son quotidien. À quel point le danseur est-il encore authentique dans un freestyle ? Est-il possible de s’approprier une culture qui n’est pas la sienne? Comment tenir toute une vie pour l’amour de la danse ? Une pièce très bien dosée qui allie performance scénique dynamique et entraînante et questionnements profonds et sensibles.  

Création 2019
Cinquième salle de la Place des arts

8 et 9 février

Créations 2019
Tangente

25, 26, 27 et 28 avril

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